Majeure 41. Propriétés / communs

Droit de propriété intellectuelle, terra nullius et capitalisme cognitif

Partagez —> /

La guerre des nouvelles clôtures

Le capitalisme cognitif peut être décrit comme l’exaspération infernale de la propriété intellectuelle. La révolution des technologies numériques a déchaîné une bataille féroce pour les nouvelles clôtures. Les nouveaux biens communs qui se produisent et se diffusent dans et par l’usage massif de l’Internet sont combattus par un arsenal juridique sans cesse renouvelé de moyens de protection techniques (alias les DRM : Digital Rights Management), et d’initiatives juridiques.

Cette guerre a ses batailles, ses victoires à la Pyrrhus mais aussi de spectaculaires renversements ponctués de jugements, d’arrêts des Cours suprêmes, mais aussi de l’irrésistible pression de la jurisprudence sur le long terme. C’est sur ce terrain que se joue aujourd’hui les trois quarts de la bataille de la redistribution. Parce que ces immatériels constituent 80 % de la valeur économique d’une paire de nike ou d’un avion rafale. Droits d’accès et droits de propriété sont au reste étroitement reliés et brouillent heureusement la frontière Nord/Sud.

Les pays du Sud mènent bataille contre la privatisation des services publics comme l’eau (Cochabamba en Bolivie) qui trouve des émules au Nord car les communes re-municipalisent la distribution de l’eau. Les pays émergents comme l’Inde, le Brésil et même la Chine (de fait) sont à la tête d’un refus du tout-brevet. Devons-nous classer cette nouvelle bataille des clôtures dans la phase d’accumulation primitive du troisième capitalisme émergent ?

Une nouvelle accumulation
primitive perdue d’avance ?

Est-ce que la version modernisée du capitalisme gagnera la bataille des partisans des nouveaux biens communs (new commoners) en ramenant tous ces comportements qui sortent du capitalisme dans une économie de marché beaucoup plus sophistiquée et capable d’assujettir la classe créative ? Prenons un exemple : IBM a investi plusieurs milliards de dollars dans le logiciel libre et détaché des développeurs dans le projet Debian. S’agit-il d’un choix sans retour pour des solutions non propriétaires ? Certes, à la différence de Microsoft, IBM a compris que le modèle propriétaire attaché à des produits incorporant du travail immatériel codifié (immatériel 1)[1] était obsolète, mais son incursion dans le monde de la culture du libre lui permet de comprendre la valeur des immatériels 2 (toutes les connaissances non codifiées ou non codifiables) qui jouent un rôle déterminant dans la découverte de solutions différentes. Et après avoir repéré les nouveaux gisements d’immatériels chez les Navis de l’Internet et du Libre, comme Google, la firme pourrait revenir à une normalisation financière et à du service codifié appuyé par de nouveaux types de DRM.

L’issue de la nouvelle bataille des clôtures fait l’objet d’un débat animé entre Geert Lowink[2] et Alexander R. Galloway & Eugene Thacker[3] à propos de l’évaluation qu’il convient de faire du modèle hybride de gratuit et de publicité indirecte Google dans son opposition au vieux modèle propriétaire de Microsoft. Peut-on miser ou non sur les contradictions entre le vieux capitalisme industriel et le capitalisme cognitif immatériel avec ses nouvelles règles d’appropriation encore hésitantes ? Si le capitalisme présente ce double visage, ne faut-il pas nous attendre au pire, c’est-à-dire à l’alliance entre le capitalisme militaro-pétrolier et la face sombre du capitalisme cognitif (le tout-brevet sur le vivant des grands laboratoires pharmaceutiques ou des engrais et pesticides) ? Ce scénario sinistre prévoit la victoire de la nouvelle « accumulation primitive » sur les nouveaux « commonistes » ou nouveaux niveleurs. Est-ce plausible ?

Le nouveau mode de production cognitif de la valeur économique se trouve confronté à de nouvelles contradictions. Cette étrange partie se joue à plusieurs niveaux, celui des logiciels libres, mais aussi celui des droits de peuples premiers comme l’atteste la remise en cause généralisée du principe de la terra nullius, ou bien « l’internationalisation du droit » des biens déclarés patrimoine de l’humanité qui peuvent entraîner un moratoire de toute exploitation industrielle comme c’est le cas du continent antarctique[4].

Les droits de la propriété intellectuelle de l’ère industrielle exaspérés et menacés

La révolution numérique a permis l’avènement d’une production globale et décentralisée à travers les réseaux, la production Peer to Peer[5]. Le travail peut maintenant être défini comme la coopération intelligente des cerveaux reliés en réseaux (Lazzarato 2002). La même transformation globale conduit à porter une attention croissante à la contextualisation des connaissances, c’est-à-dire à la part des immatériels qui n’est pas codifiable. L’apprentissage, l’invention, l’innovation, la création artistique qui possèdent des caractéristiques des biens publics tels que les définit l’économie deviennent le cœur de la valeur économique. Ils ne peuvent cependant être transformés en biens marchands que par l’attribution juridique d’un monopole de détention à une entité privée (marque, brevet, droit d’auteur).

Or, les difficultés de reproduction à l’identique qui garantissaient la mise en œuvre de ces droits artificiels sont tombées avec la numérisation des contenus, la puissance de mémorisation croissante des ordinateurs, la capacité d’acheminement (haut débit, très haut débit) et les possibilités de mise en réseau de l’information à un coût marginal nul. Il en résulte depuis 1995 une crise sans précédent de toutes les industries culturelles.

L’immatérialisation croissante de la production disqualifie les modèles reposant sur la perception d’une recette liée à la vente d’un produit matériel. La numérisation et le développement foudroyant du réseau des réseaux numériques disqualifient à leur tour l’adoption des solutions « industrielles » de la propriété intellectuelle. Cette double crise a entraîné l’émission croissante de droits de propriété intellectuelle. Le caractère inapplicable de ce renforcement de la DPI a poussé à breveter en amont et en aval de l’invention technique : les découvertes fondamentales du génome, sous prétexte qu’il fallait un dispositif complexe pour le révéler, ont été rangées dans le brevetable et l’appropriable pendant 15 ou 20 ans. Ainsi l’accroissement des dépôts de brevet a été spectaculaire au Japon, en Corée du Sud, aux États-Unis. Mais cette bulle de droits de la propriété intellectuelle ne touche pas les industries traditionnelles comme la chimie ou la métallurgie. Elle concerne surtout l’agro-industrie, l’industrie pharmaceutique, les biotechnologies, les télécommunications, l’informatique et les industries culturelles. Depuis le Bayh-Dole Act, la décision Chakrabarty de la Cour suprême américaine consacrant dès 1980 la brevétisation d’un micro-organisme vivant et l’institution du Nasdaq, une bourse des valeurs technologiques, les États-Unis ont mené une stratégie très cohérente de renforcement tous azimuts de la propriété intellectuelle, jusque dans le cycle des négociations internationales sur les services à Doha, capitale du Qatar. Microsoft a mené une bataille de lobbying outrancière, gagnante au Japon, perdante en Europe pour essayer d’imposer la brevétisation des logiciels. Monsanto a fait de même pour les OGM[6]. Les majors de l’industrie culturelle anglo-saxonne ont été aux avant-postes de la lutte contre toutes les formes techniques ou comportementales de « violation » de la propriété intellectuelle, en particulier le téléchargement sur Internet ou les luttes contre la monopolisation des semences. Les procès innombrables sont souvent arrivés devant les juridictions les plus hautes : l’affaire Percy Schmeiser[7] pour la Cour Suprême du Canada (2004)[8], Naptser, KazAa[9] and Grokster[10] pour celle des États-Unis ou d’Australie. Récemment les négociations secrètes entre les principaux États du Nord d’un accord sur le commerce déstiné à combattre la contrefaçon (Anti Counterfeiting Trade Agreement) vise à attaquer la neutralité de l’Internet qui fait obstacle à sa normalisation purement marchande[11].

Ces luttes très âpres n’ont pas empêché la progression des logiciels libres, à l’instar de Mozilla pour le logiciel d’accès à l’Internet Firefox (fils de Netscape, navigateurs des débuts du World Wide Web en 1995) de plus en plus téléchargé, ou du langage Java. Des universités, des villes puis de très grandes entreprises se sont ralliées au libre, plus efficace et surtout plus économique[12]. Dès lors, le retour du bâton « propriétaire » vient-il vraiment, comme certains détracteurs du libre le prétendent, d’un simple défaut de définition des droits de propriété intellectuelle dans les anciens pays socialistes ou en voie de développement ? La raison actuelle de cette exacerbation de leur revendication a bien quelque chose à voir avec la nouvelle contradiction interne qui affecte le capitalisme cognitif. Mais l’accent outrancier sur l’exécution des droits de propriété intellectuelle révèle plutôt ce paradoxe qu’il suppose la pollinisation des nouveaux biens communs, les jachères méliflores, bien plus que l’augmentation de son propre pouvoir de contrôle. Doit-on soutenir que les nouvelles clôtures conduisent à une nouvelle tragédie, celle de la réussite par le capitalisme cognitif de l’expropriation du cognitariat[13] ? Une marchandisation totale de l’éduction, de la transmission, de la connaissance, du soin, de l’activité vivante, de la créativité artistique et scientifique n’est qu’une idéologie intéressée du capitalisme. Car la nouvelle définition de l’exploitation, non plus de la force de travail mais de la force inventive, le rôle croissant des externalités non codifiables renvoient tous au « Commonisme » qui hante le cœur stratégique du nouveau capitalisme. De par l’ambiguïté de son rapport à la connaissance, le capitalisme cognitif ne peut prétendre à l’hégémonie que dans la mesure où il laisse libres ces nouveaux communards qui pourtant rejettent les règles strictes de la propriété intellectuelle. Cela constitue une différence importante avec la situation qui prévalait à la veille de la révolution industrielle. On s’en rend compte en examinant la transformation du concept de domaine commun par rapport au vieux domaine public.

Modèle économique et propriété des biens de connaissance et de culture
dans une société de la connaissance

Tout bien connaissance doit appartenir au domaine public, au domaine du droit d’auteur ou sinon à celui du brevet ou de la marque. Sur le logiciel, bien le plus caractéristique de la révolution numérique, cette polarité est réapparue sous la forme de l’opposition entre le logiciel propriétaire et le logiciel libre. La barrière empêchant l’accès à l’appropriation (la jouissance de la propriété) se traduit techniquement par l’impossibilité d’accéder au code source. On a opposé ainsi dans les logiciels le domaine régi par le droit de propriété privée et celui régi par l’open source.

Le mouvement des logiciels libres quand il a mis en place le Copyleft[14] a défini de nouvelles règles d’appropriation et d’usage du logiciel. Il refuse l’alternative traditionnelle : la solution du droit d’auteur interdisant toute reproduction ou bien la liberté complète, c’est-à-dire la possibilité d’user comme on veut (open use) du domaine public y compris pour un usage commercial en refermant le code source du logiciel. Le régime de Copyleft inverse complètement le rôle du marché et le rôle des exceptions. Sous un régime de copyright, la reproduction du logiciel est strictement interdite durant la période de protection. Remonter au code source à partir de la version compilée du logiciel au programme lui-même est interdit. Les cinq usages tolérés constituent une exception. Tout autre mode de reproduction doit faire l’objet d’un accord spécifique de l’auteur ou de ses représentants et ayant droit. La Licence publique Globale (GPL) renverse ce système : les cinq exceptions constituent la norme et le statut ordinaire d’un programme informatique. L’usage commercial constitue une exception au domaine public. Un logiciel libre peut être vendu sur le marché dans la mesure où la documentation afférente présente un coût de reproduction ou d’installation (service), mais ce n’est pas au nom de la propriété intellectuelle du programme numérique lui-même. L’ouverture du code source est exigée pour rendre possibles les quatre libertés accès et étude du programme, partage des améliorations avec l’équipe initiale, modification, redistribution du programme sous sa version modifiée.

Le Copyleft représente-il la chute anticipée du programme dans le domaine public ? Quelle est la différence fondamentale d’un programme qui serait tombé dans le domaine public avec le statut permanent d’un logiciel libre ? Le logiciel libre définit un droit de suite par ses auteurs beaucoup plus contraignant que le domaine public. Ce ne sont pas les mêmes règles que celles qui régissent le droit d’auteur, on peut même dire que ce sont des règles d’usage opposées, mais il s’agit de règles. Le Copyleft fait donc usage du droit privatif (les prérogatives de l’auteur) pour empêcher un usage commercial du domaine public. Ces règles visent à les affranchir des règles nuisibles d’un certain type de propriété commune sur les biens numériques. Rien ne montre mieux la différence qui sépare le mouvement pour une nouvelle codification des règles d’appropriation des biens numériques de ce que l’on appelle le domaine public, que la naissance du conflit entre le Copyleft et l’Open source.

En 1999, Eric Raymond et Bruce Perens lancèrent le mouvement de l’Open source. L’objectif était, devant la réticence voire la franche hostilité des industriels, de susciter l’adhésion du maximum d’opérateurs à un système simplifié pour gagner la bataille des normes contre le système propriétaire.

En abandonnant les deux conditions, la reconnaissance et mention de paternité ainsi que l’obligation de transformer en programme non propriétaire tout programme incorporant du libre pour ne conserver que l’ouverture initiale du code, le Mouvement Open Source revenait à la conception traditionnelle du domaine public. C’est-à-dire un ensemble de ressources en accès illimité laissant toute liberté à des entreprises privées de les transformer en input gratuit de leur production marchande. La seconde condition posée par le Copyleft cherche au contraire à empêcher cet usage illimité par le privé du domaine public. Dans la licence Copyleft, le domaine public n’est pas le résidu de ce qui n’est plus protégé par les droits complets de la propriété privée mais la base nécessaire à l’organisation de toute production y compris la production marchande qui dépend largement des externalités positives.

Il en découle des conclusions très concrètes en matière de politiques publiques. Si les Nouveaux Biens Communs sur la Toile (par exemple les archives publiques) sont une source fondamentale d’externalités positives, pour financer toutes les activités scientifiques, culturelles et artistiques il faut faire en sorte que les activités marchandes contribuent à leur financement.

Le mouvement des Creatives Commons lancé par Lawrence Lessig a cherché à répondre aux critiques adressées par l’Open Source au Copyleft. Les entreprises veulent avoir un système de droits clair, souple. D’autre part, les formes de créations intellectuelles ne sont pas systématiquement incrémentales et séquentielles. Une œuvre d’art révélée sur la Toile ne possède pas un code source ou une version compilée. La perception sensible y a accès sans qu’il soit nécessaire de les débloquer. C’est la raison pour laquelle les Creative Commons ont développé six types de licences[15] et totalement réinterprété les cinq libertés découlant des exceptions au droit d’auteur. Au lieu d’être des exceptions tolérées pourvu qu’elles n’ont pas d’incidence économique majeure, les cinq circonstances autorisant la reproduction sans verser de droits d’auteur deviennent la base de la loi. On peut donc, pour chaque création, choisir d’exiger ou non la mention de la paternité, permettre ou non la modification, autoriser ou non l’utilisation commerciale, et imposer ou non la nécessité pour la création seconde de respecter les règles de licence de l’œuvre première qu’elle aurait utilisée[16].

Quelle conséquence peut-on tirer de ceci ? La première est que le droit bourgeois de propriété illimitée attribué à un individu n’est qu’un cas particulier des diverses formes d’appropriation par différents types de sujets, dont des sujets collectifs. Ce résultat est au reste conforme au travail mené par Elinor Ostrom[17] qui montre que les droits de propriété font partie des arrangements institutionnels et que les firmes de propriété communes règlent la production et les usages de biens appartenant à des milieux complexes et fragiles de façon nettement plus satisfaisante que la grossièreté du modèle unique du droit de propriété de l’individualisme possessif de Locke sur lequel s’est édifié l’homo oeconomicus.

Open source, terra nullius,
droits d’appropriation,
droit de contrôle des usages

Pour le capitalisme cognitif, les nouveaux biens communs de l’économie de contribution et de coopération en réseau constituent une sorte de transposition du principe de la Terra Nullius, longtemps appliqué par les législateurs coloniaux puis postcoloniaux vis-à-vis des ressources utilisées par les Peuples Premiers (nommés auparavant « Primitifs », puis « aborigènes »).

Ce principe revient à poser que toute forme d’appropriation qui ne spécifie pas par écrit les trois formes de l’usus, du fructus et de l’abusus au profit d’un individu ne constitue pas une forme aboutie de propriété et par conséquent ne sont pas génératrices d’obligations contraignantes pour le colon, ou la puissance coloniale. La terre n’est à personne (ni de personne). Ce principe a permis l’annexion pure et simple des terres des Amérindiens, des Bushmen australiens ou sud-africains.

On connaît désormais fort bien des exemples de compagnies multinationales qui se sont approprié gratuitement qui des motifs de peinture aborigène australienne pour des modèles de textile, qui des données sanguines sur des populations andines, qui des molécules de plantes naturelles (le Hoodia, le Margousier ou des variétés de semences) dont les vertus médicinales étaient connues depuis longtemps dans les savoirs traditionnels pour déposer des brevets. Ces formes modernes d’exploitation des ressources culturelles et « naturelles » des pays du Sud sont combattues sous le nom de biopiraterie par la fondation de Vandana Shiva[18].

Mais la plupart des victoires remportées par les Peuples Premiers en matière de terre, d’artisanat, d’art, de logement, de culture sont dues à des stratégies intelligentes et subtiles d’utilisation de tout l’éventail du droit pour augmenter la puissance d’agir des gens.

Si les anciens et nouveaux « commonistes » ou communistes des tribus amérindiennes aux hackers P2P de la Toile ne prêtent pas suffisamment attention aux formes concrètes de propriété ou d’appropriation mis en place par des collectifs ou des communautés, ils ne seront pas capables de défendre les portes et les frontières du domaine commun. Ils se retrouveront ballotés du Charybde du marché pour tous de la propriété intellectuelle à tout va au Scylla des Bantoustans du communisme primitif selon l’évangile de la nouvelle accumulation. Le refus de toute forme de propriété (c’est-à-dire de définition par une communauté, un pays, un ensemble de pays ou la communauté internationale de règles d’usage et de suite dans l’utilisation des biens immatériels) dans un domaine public rappelle la vigoureuse défense des communautés « primitives » des Africains par les Afrikaners qui renforcèrent l’interdiction de toute forme de propriété personnelle dans les réserves qu’ils organisèrent en Afrique du Sud au temps de l’apartheid.

La Cour Suprême brésilienne vient de prendre une décision capitale dans l’affaire des Indiens d’Amazonie de la réserve Raposa Serra do Sol dans le territoire de Roraïma. Les 19 000 Indiens à qui était théoriquement dévolu un territoire de 17 000 km2 voyaient, processus classique, leur réserve mitée par des défrichements légaux ou illégaux. Dans leur recours devant la Cour Suprême brésilienne, ils ont réclamé d’être maîtres chez eux et de contrôler sans appel l’usage de la forêt et des ressources qu’elle contient sur un territoire continu. Ils ont fait valoir que cela fait 10 000 ans environ qu’ils occupent l’Amazonie et qu’ils se sont montrés capable de préserver la forêt bien mieux que les divers « metteurs » en valeur qui se sont succédés depuis 1500 et qui, après avoir détruit la Mata Atlàntica, sont en train de détruire l’Amazonie.

Le 19 mars 2009, ils ont gagné. La Cour a donné aux occupants illégaux du territoire indien jusqu’au 30 avril pour l’évacuer, et en particulier pour quitter les 15 000 hectares de culture de riz. Il s’agit d’une décision qui fera jurisprudence au Brésil où plus de 122 réserves indiennes affrontent de semblables problèmes.